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1999 | 55th Regular Session of the UN Commission on Human Rights (22 March - 30 April 1999)

The Christian minority in Pakistan (in French)

March 22 – April 28, 1999
Palais des Nations, Geneva

Franciscans International, les Dominicains, la Commission des Églises pour les affaires internationales du Conseil oécuménique des Églises et l’Alliance mondiale des Églises réformées souhaitent porter à l’attention de la 55e session de la Commission des Droits l’homme la situation des minorités religieuses au Pakistan.

Notre document concernent trois sujets qui nous causent de graves inquiétudes:

  1. Le système des élections séparées pour les minorités religieuses au Pakistan.
  2. Les lois sur le blasphème, sections 295 B et C du Code pénal du Pakistan.
  3. Le projet de loi du gouvernement en vue de l’adoption du quinzième amendement (la loi du Shariat).

Historique
Le Pakistan a été créé en 1947 lorsque les provinces majoritaires musulmanes du Bengale de l’est, le Punjab, Sind et la frontière nord-ouest et le Baluchistan, avec une population totale de 95 millions de personnes, se sont jointes ensemble pour former la Fédération du Pakistan. (En 1971, l’est du Pakistan est devenu l’état indépendant du Bangladesh.)

S’adressant à la première assemblée constituante, le 11 août 1947, le fondateur du pays, M.A. Jinnah donna les assurances suivantes aux minorités: “Vous pouvez appartenir à n’importe quelle religion ou caste ou croyance, cela n’est pas du domaine des affaires de l’État…Même maintenant il y a des états qui existent où la discrimination existe et où des barrières sont imposées contre un classe particulière. Dieu merci qu’on ne retourne à cette période. Nous commençons maintenant un période où il n’y pas de discrimination envers une caste ou une croyance contre une autre.

Nous commençons avec le principe que nous sommes tous citoyens et citoyens égaux d’un état.” Ces mots ont été prononcés par le Père de la nation qui a mené le mouvement pour un Pakistan indépendant, mais ils semblent avoir perdu leur pertinence dans la réalité du Pakistan d’aujourd’hui.

Le Pakistan, qui était un pays avec un idéal progressif et tolérant, est devenu aujourd’hui une société déchirée par la corruption, l’intolérance et la violence. Les minorités religieuses sont la cible de fanatisme qui est souvent attisé par des forces extrémistes et des partis politiques islamiques et leurs chefs. L’incapacité des gouvernements successifs à contrôler le mouvement des extrémistes religieux dans le pays a pour effet d’affermir le pouvoir de ces derniers. Le manque de volonté de part du gouvernement de mettre fin à ces tendances destructives a encouragé les extrémistes à continuer avec impunité à persécuter et opprimer les minorités. Aussi longtemps que le gouvernement manquera de courage moral, pour des raisons d’opportunisme, pour prendre action contre ces éléments extrémistes, la situation dans le pays demeurera inchangée.

1. Le système des élections séparées pour les minorités religieuses au Pakistan.
En 1979, la dictature militaire du feu Général Zia ul-Haq avait introduit un amendement aux lois électorales du pays qui avait transformé le système d’électorat commun tel qu’envisagé par la Constitution de 1973, en un système d’électorats séparés. L’amendement avait été introduit à la demande des partis politico-religieux qui prétendent que les non-musulmans au Pakistan sont des “Zimmis” ou des citoyens de seconde classe. Pendant les deux dernières décennies, les gouvernements succesifs au Pakistan ont établi des politiques discriminatoires qui empêchent les non-musulmans d’obtenir des postes importants dans la fonction publique et au niveau de la cour supérieure.

Le système d’électorats séparés enlève aux minorités dans le pays le droit fondamental de suffrage universel. Selon ce système, les non-musulmans votent séparément pour un nombre désigné de places réservées aux candidats non-musulmans dans les parlements national et provinciaux. Cela signifie que l’électorat non-musulman peut seulement voter pour des candidats non-musulmans qui contestent les places réservées et qu’il ne peut pas voter pour les candidats musulmans dans les élections générales. Cette politique discriminatoire fondée sur la religion a pour effet de couper le citoyen non-musulman de la vie politique nationale. De plus, cette discrimination leur enlève le droit de participer directement dans le processus décisionnel au niveau national ainsi que dans l’élaboration des politiques économiques, sociales et culturelles du pays. Il existe aussi le même type de discrimination au niveau local.

Nous nous objectons fortement à toute justification affirmant que les dispositifs de cette loi du Pakistan protège les droits des minorités religieuses. Nous considérons que cette institutionnalisation de la discrimination comme une forme d’”apartheid” religieux qui limite officiellement les droits des citoyens pakistanais à participer pleinement dans la vie de leur société.

Le système d’électorats séparés tel que mise en vigueur au Pakistan est une contravention des articles deux et 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi que des articles 25 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

2. Les lois sur le blasphème, sections 295 B et C du Code pénal du Pakistan
Dans leur forme présente, les lois sur le blasphème sont une source d’oppression et de persécution des minorités dans le pays. Les minorités sont sujettes à toutes sortes d’humiliation en raison de fausses accusations faites selon ces mêmes lois. Dans le présent climat de haine, d’intolérance et de violence au Pakistan, les lois sur le blasphème sont devenues un outil important dans les mains des extrémistes qui veulent régler des comptes personnelles avec les membres des minorités religieuses, surtout chrétiennes. Les lois sur le blasphème comportent une définition vague du blasphème, mais la punition peut aller jusqu’à la peine de mort obligatoire. Il existe aussi de sérieux problèmes quant à la mise en oeuvre des lois. Depuis que la peine de mort obligatoire a été introduite suite à la loi sur l’amendement 111 (1986) à la section 295 C, plusieurs personnes innocentes ont perdu la vie, et dans plusieurs cas même avant de comparaître devant les tribunaux. Par exemple, Niamat Ahmer, Tahir Iqbal et Manzoor Masih ont été tués avant même que les tribunaux puissent entendre les accusations portées contre eux. Plusieurs victimes des lois blasphématoires ont été obligées de se réfugier dans des pays à l’étranger et d’autres de se tenir cachées.

Dans la situation présente, les avocats qui défendent les causes de personnes accusées d’infractions aux lois sur le blasphème sont la cible de menaces. Nous citons l’exemple du juge retraité de la cour supérieure de Lahore, M. Arif Iqbal Bhatti, qui a été tué par un extrémiste musulman pour avoir annulé la peine de mort imposé par la cour de cassation à Salamat Masih et Rehmat Masih. Son meurtrier, comme celui de Manzoor Masih, n’a jamais été appréhendé. En vue des menaces continues, il est devenu très difficile de trouver des avocats qui veulent défendre des cas d’infraction aux lois discriminatoires. En mai 1998, il y a eu le cas de l’évêque catholique de Faisalabad John Joseph qui s’est donné la mort pour protester contre les lois sur le blasphème.

Dans ce climat d’intolérance et de menaces, et étant donnée la pression exercée sur les juges, il est devenu presque impossible d’obtenir un procès impartial pour ceux qui sont accusés d’infractions aux lois sur le blasphème. Dans de telles circonstances, il arrive souvent que la cour
inférieure accuse et juge coupable l’accusé sans avoir examiné les preuves d’une façon adéquate. Dans le cas de Gul Masih, il a été condamné à mort par le juge de session du tribunal d’instance parce qu’il “ressemblait à un bon musulman; qu’il était étudiant et qu’il portait la barbe”. Il y a présentement plusieurs personnes en attente de procès pour atteinte aux lois blasphématoires, dont Ayub Masih, Nelson Munawar Rahi, Catherine Shaheen pour en nommer que quelques uns. De plus, deux organisations musulmanes ont offert un prix de 1.3 million de roupies pour le meurtre de Salamat Mashi et de Rehmaat Masik qui vivent en exil.

Les représentants du gouvernement du Pakistan à la Commission des Droits de l’homme de l’ONU ont déclaré que le gouvernement est très conscient des dangers et a mis sur pied des mesures et des sauvegardes appropriées pour protéger contre le mauvais usage des lois sur le blasphème. Cependant, les cas récents de blasphème à Gojra, Alipur Chatta (le district Gujranwala), et à Toba Tek Singh, prouvent que la procédure pour enregistrer de tels cas n’a pas été modifié et qu’aucune mesure n’a été prise pour éliminer l’injustice de la loi. De plus, cet état de chose est un reflet du manque d’engagement de la part du gouvernement du Pakistan. Les forces de sécurité continuent en toute impunité à harceler les accusés et leurs familles.

3. La loi du gouvernement en vue d’adopter le quinzième amendement (la loi du Shariat)
Le gouvernement du Premier ministre Nawaz Sharif a déposé, le 28 août 1998, une loi pour amender la Constitution du Pakistan (le 15e amendement ou la loi du Shariat) par lequel le Coran et la Sunnah du Saint Prophète e (PBUH) deviendraient la loi suprême du pays. Le Premier ministre a été cité déclarant qu’il était en faveur d’un système de justice style Taleban comme modèle de punition rapide et d’effet préventif pour mettre fin à la violence, au crime et à la corruption.

Bien que nous apprécions l’intention du gouvernement de contrôler la corruption par l’introduction de la loi du Shariat, nous avons de sérieuses craintes que dans le climat actuel l’adoption de la loi contribuera à augmenter l’insécurité des minorités ainsi que des conflits sectaires au sein de la société conduisant à encore plus de violence. Nous demandons, donc, au gouvernement de retirer son projet de loi sur le 15ème amendement.

Enfin, nous, Franciscans International et les Dominicains, la Commission des Eglises pour les affaires internationales du Conseil oécuménique des Eglises et l’Alliance mondiale des Eglises réformées, de concert avec la Conférence des évêques catholiques du Pakistan, la Commission nationale de Justice et Paix du Pakistan, la Commission des Droits de l’homme du Pakistan et le groupe inter-religieux “la Commission nationale de coordination chrétienne-musulmane” demandons à la Commission des Droits de l’homme de l’ONU d’exhorter le gouvernement du Pakistan à protéger et à promouvoir plus fortement les droits légitimes des minorités religieuses.
En particulier, la Commission devrait demander:

  1. Que le gouvernement du Pakistan abolisse le système d’électorats séparés qui est discriminatoire et qui encourage les divisions dans la société sur la base de la religion.
  2. Que le gouvernement abroge les lois sur le blasphème, surtout les sections 295 B et C du Code pénal du Pakistan.
  3. Que le gouvernement du Pakistan prenne des mesures concrètes et pratiques pour inculquer des valeurs de tolérance religieuse en enlevant les aspects discriminatoires du curriculum scolaire.
  4. Que le gouvernement cesse de transmettre sur les médias contrôlés par l’état les programmes discriminatoires qui ne font qu’enflammer la haine et l’intolérance.
  5. Que les Rapporteurs spéciaux sur l’intolérance religieuse et celui sur l’indépendance des juges entreprennent des visites au Pakistan le plus tôt possible et qu’ils soumettent leurs rapports à la Commission des Droits de l’homme.
  6. Qu’en vue de promouvoir la paix et l’harmonie au Pakistan, le gouvernement retire le projet de loi portant sur l’amendement 15 en vue de la mise en application de la Shariat comme la loi suprême du pays.
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